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par Serge Vieillard
en ce qui me concerne, je me contrefiche de l'appellation - même si les propositions de Lolo sont adéquat
et tant mieux si ces nouveaux outils font le bonheur des astrams.
Ha Gisèle, comme je te comprends, et compatis.
Qu'il est dur, qu'il est délicat, parfois frustrant le combat derrière l'oculaire. Tu m'évoques mes anciennes copines de mon club Magnitude 78, Natacha -qui fut notre glorieuse présidente une décennie durant, forgeant les bases de notre beau club - ou Brigeou - formidable experte et réalisatrice d'instruments anciens, astrolabes et autres drôleries. Aucune ne se régalait à l'oculaire, elles en étaient vraiment frustrées et déçues - et pourtant, Brigeou avait fabriqué et poli elle-même son T250 Strock, de superbe facture avec polis aux petits oignons. Mais nada, que pouic, rien qui vaille de s’esbaudir - ou si peu...
Et bien je suis certain que ces nouveaux outils peuvent leur apporter une très grande satisfaction, un réel apport, une sorte de révélation de ce qui peut s'observer, en tout cas la possibilité de partager plaisamment des nuits d'observation et leur redonner goût des escapades nocturnes.
Mais aussi, cela montre combien l'observation astronomique est une discipline très exigeante, pas facile, elle demande un réel apprentissage, on pourrait quasiment caricaturer en disant que c'est du sport - ou un art.... et je comprends que ça ne soit pas la tasse de thé de chacun. En ce sens, je suis toujours épaté de voir combien la marge de progression est encore phénoménale même à nos âges désormais respectables. Chose paradoxale car le temps s'écoulant inexorablement, nos performances visuelles déclinent tout aussi inexorablement. Et oui car observer n'est pas voir. Et observer est l'analyse des stimuli perçus, parfois (ou souvent) à la limite de la chose évidente et certaine. Vraiment pas facile car comme tu le soulignes, on est sur le fil du rasoir entre réalité-hypothèse douteuse, l'autosuggestion. Mais pourtant, on accumule avec une extrême parcimonie de l'information, un écart de luminosité infime, un micro détail, une lueur qui n’est qu'un noir un chouya moins noir que l'environnement, etc.... seuls les informations validées à plusieurs reprises sont retenues, les autres évacuées. D'où l’immense intérêt du dessin qui, par touches successives, va valider - ou non -ces informations, les cumuler, faire du "stacking", du compositage, pour au final recueillir la totalité de ce qui à été perçu, vue qui transcende une "simple" vision à l'oculaire. On a ainsi essoré le sujet, on lui a tiré les vers du nez.
Et à ce jeu, sauf pathologie ophtalmique, on s’aperçoit que le "métier" paye et on a toujours à se bonifier.
Par exemple, j'ai beaucoup appris au contact de mon ami Nicolas Biver, observateur hors pair d'une modestie incomparable. Juste en soulignant des détails genre "sur Ganymède, vois-tu que ce n’est pas tout fait uniforme ? ben note ces quelques variations" et au final, ça avait du sens au regard d'une image de comparaison. Mais aussi combien de cuisants échecs, genre "tu ne vois pas la nébuleuse de la Trompe ? elle est portant là, plein champ". Ben que pouic, et cela pendant des années. Ce n’est que cet été à Valdrome qu'enfin, j'ai déchiffré cette déchirure improbable à peine soulignée d'un liseret fantomatique, mais cela sans équivoque possible. Quelle belle "victoire" (je n'ai pas le terme exact, celui-ci n'étant pas judicieusement nuancé).
De-diou, cela me fait littéralement vibrer !!!! Ça rend modeste, avec la certitude qu'on a toujours à apprendre et se perfectionner, c’est merveilleux. Merveilleux de se dire que les observations de demain peuvent être encore plus spectaculaires.
Tout autant me fait vibrer quand au pied du télescope, je guide un observateur en lui soulignant des détails présents à détecter qui petit à petit, révèlent l'objet invisible de prime abord. Cela parfois avec l'aide d'un croquis vite réalisé sur place ou d'une image de référence - ou pourquoi pas d'un truc électronique dont il est question ici. Immense plaisir que d'offrir la découverte en visuel des Piliers de la Création et autres drôleries du même tonneau. Ce sont des moments d'intense émotion.